Pour maîtriser la pâtisserie Française, il y a quelques recettes de base à bien connaître et la pâte à brioche en fait partie. Mais, au-delà de connaître les recettes, il faut pouvoir les comprendre. C'est ainsi que vous pourrez vous les approprier et vous libérer de la contrainte de certains livres ou encore adapter et créer vous-même de nouveaux desserts.
Dans cette suite d'articles sur les bases de la pâtisserie, je vais m'attacher à vous expliquer simplement les mécanismes en jeu. Vous aider à comprendre qu'il n'est pas nécessaire d'être précis au gramme près, mais que chaque ingrédient a un rôle. Que les proportions permettent simplement d'obtenir des variations de recettes et qu'un échec n'est pas forcément dû à une mauvaise recette.
Boule sucre, tarte tropézienne, kouglof, pains au lait, tous ces noms désignent la pâte levée. À la base de nombreuses recettes simples, la pâte à brioche reste techniquement complexe dans sa réalisation. De nombreux phénomènes sont en jeu et leur compréhension vous aidera à obtenir un résultat professionnel. Fini la brioche tassée, exit la tresse raplapla et bonjour le savarin qui va vous rendre baba.

Principes :
- Le gluten est à la base de cette recette. Il donne cette structure alvéolée si particulière aux pâtes levées. Raison pour laquelle il est si difficile de concevoir une brioche sans gluten. Ce dernier est présent à hauteur de 10 à 12% dans la farine de blé (fonction du type) et est mis en jeu à partir du moment où la farine est humidifiée. Cependant, c’est le travail mécanique de la pâte qui va créer ce réseau élastique, nécessaire à la rétention du gaz de fermentation. Il est donc important de pétrir longuement la pâte.
- La fermentation joue également un rôle dans le développement du réseau de gluten. En effet, la levure, en transformant les sucres en alcool et CO², va donner de l’élasticité au gluten. Ainsi, plus vous laissez pousser la brioche, plus le gluten sera mis en jeu. Par ailleurs, plus vous laissez du temps à la fermentation, plus les arômes seront développés et moins le goût de levure sera présent. Je vous conseille d’adapter la quantité de levure en fonction du rapport sel/sucre (régulateurs de fermentation) et de la température ambiante. Plus la température sera élevée, plus la pousse sera rapide. C’est également le cas pour une quantité de sucre élevée ou une quantité de sel faible. Dans le langage professionnel, la fermentation se divise en deux parties : le pointage (avant le façonnage) et l’apprêt (avant la cuisson).
- La température est l’un des derniers critères à ne pas négliger. Le beurre fond en moyenne aux environs de 30°C. Si la brioche dépasse cette température, (lors du pétrissage, de la manipulation (vos mains sont à 37°c), ou encore du façonnage) sa texture va ramollir et elle sera difficile à travailler. Vous obtiendrez une pâte irrégulière qui se déformera à la cuisson. Je vous conseille donc d’utiliser des ingrédients froids et de passer la pâte levée aussi souvent que nécessaire au frigo ou congélateur pour en diminuer la température.
Ingrédients :
Pour deux brioches type Nanterre
- 500 g de farine T45 (ou 250 g de farine T45 + 250 g de farine T55)
- 15 à 20 g de levure boulangère fraîche
- 10 g de sel
- 60 g de sucre
- 300 g d’œuf froid (environ 6 œufs)
- 15 g de lait froid
- 300 g de beurre froid
- Facultatif : poudre de lait
Rôles des ingrédients :
- Farine : est l’ingrédient principal. Elle permet de donner la structure de la brioche et son type (T45, T55, T65, …) jouera un rôle important sur sa texture. En effet pour une même quantité de farine, plus le type est faible (T45), plus le pourcentage de gluten est élevé, plus la brioche sera « filante ». Mais plus le gluten est sollicité, plus la pâte sera difficile à travailler puisque élastique. Par ailleurs, à la cuisson, l’amidon contenu dans la farine (environ 70%) va se gonfler d’humidité, puis former un empois étanche, retenant les gaz et permettre à la brioche de se tenir après cuisson. Enfin, au delà de 150°C la réaction de Maillard et la dextrinisation de l’amidon (dégradation de l’amidon en sucres plus simples) vont former une croûte caramélisée et produire des arômes spécifiques de la viennoiserie.
- Levure : est responsable du développement gazeux avant et pendant la cuisson. C’est la fermentation qui permet à la pâte de développer, d’être légère et lui confère ce goût particulier. Pour fonctionner, la levure transforme les sucres (y compris ceux contenus dans la farine) en alcools (odeurs) et en CO² (pousse de la brioche). Ainsi, il convient de cuire la brioche juste avant que la levure n’ait consommé tous les sucres. Si la cuisson est lancée trop tôt : la brioche sera trop dense, si elle est lancée trop tard : la brioche n’aura pas de tenue et s’effondrera. La température idéale de développement des levures est comprise entre 25°C et 30°C. Plus la température est basse, plus le développement sera lent et plus la température est haute, plus la pousse sera rapide. Mais attention, au-delà de 28°C le beurre va commencer à fondre et quitter votre pâte levée. Au-delà de 50°C, la levure est détruite.
- Sel : a pour principale fonction de réguler la fermentation. Il limite l’action des levures en les empêchant d’accéder à l’eau. Leur multiplication est ralentie, voir stoppée en cas de concentration trop importante. Il impacte également la texture de la pâte en donnant au gluten plus d’élasticité et de fermeté. Enfin le sel joue le rôle d’exhausteur de goût.
- Sucre : est avant tout un vecteur de goût. Au delà de son pouvoir sucrant, il valorise les saveurs des autres produits, comme le beurre, la farine… Par sa quantité, c’est aussi un agent de masse et augmente le poids des préparations. Mais techniquement, il favorise avant tout la fermentation, en apportant de la « nourriture » aux levures et permet leur développement.
- Œuf : est de façon évidente l’agent de liaison de la recette. En apportant de l’humidité, il favorise l’agglomération des différents composants et autorise leur liaison à la cuisson grâce à son pouvoir coagulant à partir de 62°C. De plus, la Xanthophylle – pigment présent dans le jaune d’œuf – apporte une couleur jaune à la brioche.
- Lait : est facultatif. Il peut compléter les œufs en apportant un supplément d’hydratation. Avec en moyenne 3% de matières grasses et 4% de sucre (lactose) ce liquide confère du moelleux mais aussi du goût à la préparation.
- Beurre : est emblématique des pâtes levée. Il est important de choisir une matière grasse de qualité, à la fois pour le goût, mais aussi pour ses propriétés physiques. Le beurre d’incorporation (celui que l’on trouve en supermarché) a une température de fusion (fonte) d’environ 28°C. N’importe quel corps gras pourrait convenir dans cette recette, à condition de tenir compte de la température de fusion ainsi que du goût. Privilégiez les matières grasses à point de fusion élevé (comme le beurre de tourage) pour un travail plus facile. Au delà du goût, le beurre apporte du moelleux et de la finesse au produit fini.

Déclinaisons :
- Hydratation : entre 60 et 65% environ du poids de la farine.
- Pâte à baba : l’hydratation est d’environ 100%. La mie est plus dense et la cuisson la dessèche pour pouvoir ensuite absorber le sirop.
- Pains au lait : moins riche en beurre et les œufs sont remplacés par du lait.
- Kouglof : autolyse et ajout de fruits secs.
- Brioche feuilletée : tourage de la pâte levée avec du beurre.
- Brioche au chocolat, en ajoutant de la poudre de cacao (jusqu’à 10% du poids de la farine)
- Polonaise : brioche fourrée de crème pâtissière.
- Il existe bien d’autres exemples. La France regorge de brioche de spécialités, liées au terroirs.
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Pâte à brioche

Dans la cuve du batteur, déposez la farine tamisée, le sel, le sucre, la levure et éventuellement la poudre de lait. Veillez à ce que la levure ne touche pas le sel et le sucre.

Ajoutez la quasi intégralité du liquide (l’œuf et/ou le lait) et commencez à pétrir au crochet pendant 4 minutes à vitesse lente (1 tour par seconde). Versez le reste du liquide (1 ou 2 ml) au fond pour récupérer les dernières particules de farine. Une fois le temps écoulé, passez en vitesse rapide (2 à 3 tours par seconde) et pétrir 15 minutes.

Lorsque le réseau de gluten est prêt (vous pouvez tirer doucement sur la pâte, elle s’allonge sans casser), pétrir doucement en ajoutant le beurre froid en petits cubes.

Continuer de pétrir jusqu’à ce que le beurre soit complètement incorporé. Déposez la pâte à brioche sur une plaque farinée et couvrez-la d’un plastique (ou d’un saladier), sans la brider (elle doit pouvoir gonfler). Laisser reposer 30 minutes à température ambiante (étape du pointage). Puis donnez une forme de rectangle le plus régulier possible. Entreposez au frais jusqu’à durcicement complet.
façonnage et fermentation
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Une fois que la pâte est bien froide, dégazez en tapant délicatement de la paume de la main. Découpez des rectangles de pâte à brioche. Environ 50g pour des boules au sucre, 200g pour une tresse ou 80 g pour une brioche Nanterre.

Étalez légèrement les rectangles de pâte, puis repliez les coins vers le centre. Répétez l’opération une nouvelle vois pour pratiquement obtenir une boule. Enfin retournez la pâte et boulez la dans le creux de la main, sur un plan de travail dépourvu de farine. Cette étape va donner du corps à la pâte (pour qu’elle se tienne mieux) et faciliter le côté filant de la brioche.

Déposez vos morceaux de brioche façonnés soit sur une plaque de cuisson, soit dans un moule approprié. Couvrez d’un linge légèrement humide, d’un grand saladier, etc. pour éviter à la surface de la brioche de sécher. Cela empêche la viennoiserie de se développer. Laissez pousser (étape de l’apprêt) environ 2h30, à l’abris des courants d’air et à une température comprise entre 20 et 24°C. Il n’y a pas de formule magique pour connaître le temps de pousse, cela dépendra de la température intérieure de votre pâte, de la température extérieur et du degré d’humidité, de la quantité de levure, de sucre… La seule véritable méthode pour savoir si votre brioche a suffisamment poussée est la suivante :

Touchez là régulièrement délicatement. Si votre doigt ne laisse pas de marque, alors la brioche n’a pas assez poussée (elle sera dense après cuisson). Si votre doigt laisse une marque qui ne s’efface pas, vous avez trop laissé pousser et le gluten n’a plus de force (elle sera dense et informe après cuisson). Enfin, si votre doigt laisse une marque et que celle-ci s’efface rapidement alors c’est le moment de passer à la cuisson. Pour connaitre la bonne température et le bon temps de cuisson, posez-vous cette question : Qu’elle est la taille à cuire ? Plus la brioche sera petite, plus il faudra la cuire vite et fort pour éviter de la dessécher ou de la brûler. Pour une boule sucre de 50 g, vous cuirez environ 8 minutes à 200°C. Mais plus la brioche sera grosse et plus il faudra du temps pour que la chaleur rentre à cœur. Donc une chaleur moins importante mais un temps de cuisson plus long. Par exemple, pour une Nanterre de 750 g, comptez environ 40 minutes de cuisson à 160°C ou 30 minutes à 180°C pour une tresse d’environ 600 g.
Enfin, n’oubliez pas que votre viennoiserie est composée de beaucoup de beurre, qui est encore « liquide » à la sortie du four. Ne démoulez pas une brioche tant qu’elle n’est pas redescendue à température ambiante.
Quelques exemples d’utilisation de la pâte à brioche :
En brioche feuilletée
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En couronne :
Brioche Nanterre :
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Brioche Parisienne :
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Bonjour,
Une remarque concernant la vitesse de pétrissage, ce ne serait pas plutôt des tours par seconde, parce que par minute, c’est lent de chez lent !
J’ai vérifié sur le Kitchenaid, en vitesse 1, c’est un tour par seconde (environ)
Bonjour Etienne,
😀 Effectivement, il y avait une coquille. 1 tours par minute, même en attendant plusieurs jours… j’ai peur que ca ne soit pas assez rapide.
Je viens de corriger l’erreur, merci de me l’avoir indiqué.
Thibaut